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Augmentation des cas de coqueluche en France : «Parler de maladie infantile est une idée reçue»

, Augmentation des cas de coqueluche en France : «Parler de maladie infantile est une idée reçue»
De plus en plus de cas de l’infection respiratoire sont signalés dans le pays. Selon les chiffres de l’Institut Pasteur, le bilan témoigne de déjà onze fois plus de cas en cinq mois qu’en 2023. Pour Sylvain Brisse, spécialiste du sujet, il faut rester vigilant quant à l’évolution de la maladie dans les mois à venir.

La coqueluche repart en force au premier trimestre 2024. D’après l’Institut Pasteur, «plus de 5 500 cas positifs» ont été recensés entre janvier et mai, onze fois plus de cas qu’en 2023. D’autres pays voisins de la France sont également touchés par cette recrudescence comme la Belgique, la Suisse et le Royaume-Uni. A l’échelle européenne, 32 000 cas ont été rapportés entre janvier et mars contre 25 000 sur toute l’année 2023, d’après le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies. Sylvain Brisse, directeur du Centre national de référence de la coqueluche et autres bordetelloses à l’Institut Pasteur, décrypte pour Libération l’impact de cette épidémie.

Comment expliquer les causes de cette recrudescence de cas de coqueluche ? Qu’est-ce qui a favorisé sa prolifération ?

La coqueluche n’a pas circulé depuis 2018 environ. Les derniers pics dataient de cette période, avant le Covid. On pensait à une reprise plus tôt, peut-être en 2021, mais avec les mesures barrières et les masques, toutes les maladies respiratoires ont très peu circulé. Nous avons donc eu très peu de cas de coqueluche jusqu’à la fin de l’année dernière. Aujourd’hui, on observe un pic exceptionnel. On n’avait pas vu une telle augmentation depuis vingt voire trente ans, ce qui s’explique à la fois par un cycle naturel, mais également amplifié du fait d’un manque d’immunité naturelle dans la population puisque la bactérie, la bordetella pertussis était plus éloignée de notre quotidien.

Quel risque cela entraîne-t-il chez les nourrissons ?

Un risque de décès. C’est une maladie très grave. On tousse tellement qu’on ne parvient plus à respirer entre deux toux et donc le bébé s’asphyxie. Actuellement, on constate un grand nombre de nouveau-nés hospitalisés, souvent en réanimation. Il faut être particulièrement vigilant sur la question. En France, la vaccination des femmes enceintes est préconisée avec, depuis 2022, une recommandation dans le calendrier vaccinal. Ce premier vaccin permet de faire passer les anticorps de la maman chez le bébé avant qu’il puisse être lui-même vacciné à 2 mois puis à 4 et 11 mois. C’est le schéma de vaccination requis. Mais, de ce fait, les primo-nés jusqu’à 2 mois sont très mal protégés contre la bactérie et y sont très sensibles.

Cette contagion s’explique-t-elle également par une baisse des vaccins effectués ?

Très honnêtement, je ne le pense pas. Il y a possiblement un petit retard dans certaines vaccinations dû à la pandémie mais qui va être comblé assez rapidement.

D’après les données de l’Institut Pasteur, la moyenne d’âge des cas de coqueluche aujourd’hui est de 23 ans. Sachant qu’il s’agit généralement d’une maladie infantile, ce résultat est-il surprenant ?

Non, il n’est pas surprenant. Parler de maladie infantile pour la coqueluche est une idée reçue. Elle agit de manière plus grave sur les enfants, mais c’est une maladie qu’on constate dans toute la population. Elle peut aussi agir chez les personnes âgées, chez les jeunes adultes. Chez les adultes, la maladie dure plusieurs semaines. C’est évidemment moins grave pour eux car les effets sont moins conséquents que sur les nourrissons.

Faut-il craindre une augmentation du nombre de cas dans les mois à venir ?

Difficile de répondre. On ne peut pas prévoir à l’avance l’évolution de la maladie. Cette épidémie monte très vite, on peut donc s’attendre à ce qu’elle continue de s’accroître pendant un certain temps. Nous devons rester vigilants. Cela étant, il reste à voir si elle continue à se développer ou si les chiffres descendent dans les six mois à venir.

Quelles solutions individuelles ou collectives pourraient être mises en place pour endiguer la contamination ?

La vaccination, un peu comme celle du Covid, ne protège pas contre la transmission de la bactérie. On peut être un porteur asymptomatique même si on est vacciné. Pour endiguer les conséquences graves de la coqueluche actuelle, il faut que les femmes enceintes se fassent vacciner à partir du deuxième trimestre. Si on constate l’apparition de potentiels symptômes, il faut se faire tester, car toutes les toux ne sont pas celles de coqueluche, avec un test PCR dans un laboratoire. Les résultats arrivent en vingt-quatre heures. Si on est positif, il faut prendre un traitement antibiotique. Une solution très efficace car elle dure à peine trois à cinq jours et permet d’éradiquer la bactérie et donc la transmission. Il faut éviter d’être en contact avec des personnes à risque, les jeunes enfants, les femmes enceintes, les personnes âgées, et éviter les maternelles, les hôpitaux, les crèches, etc. Si on n’a pas le choix, si on doit se rendre sur son lieu de travail en toussant, le port d’un masque est nécessaire pour limiter les risques de contamination.

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