Pourquoi est-ce important pour vous de sensibiliser à la langue des signes ?
« Il faut que les gens puissent nous voir, voir qu’on existe. Que ce n’est pas un sujet tabou. Nous ne sommes pas des handicapés. C’est important de le dire. Nous sommes des gens normaux avec une langue différente. C’est comme de l’anglais ou de l’allemand. »
Comment se passe le quotidien quand on est sourd ?
« Avant, c’était compliqué. Des parents sourds devaient rester éveillés et surveiller leur bébé à tour de rôle. Pour le réveil, il fallait pouvoir se lever naturellement. Mais ça évolue. Au niveau du quotidien, beaucoup d’appareils sont adaptés. Par exemple, le réveil peut vibrer. En revanche, même s’il y en a, il manque encore des séances de cinéma avec des films sous-titrés. C’est aussi compliqué au niveau de l’administration. Par exemple, pour la Sécurité sociale, il n’y a un interprète qu’un mercredi par mois. »
« J’ai grandi dans le Nord, vers Arras. J’étais en échec scolaire. Ça a été affreux. Jusqu’à ce que je découvre la langue des signes. C’est avec ça que j’ai pu m’épanouir. Avec ça que je me suis rendu compte que je pouvais échanger comme les autres. À 20 ans, attirée par la mer, je suis arrivée à Saint-Brieuc, j’ai découvert la Maison des sourds. Je ne savais pas que ça existait. Ça m’a aidé. Je me suis ensuite formée pour devenir enseignante en langue des signes. »
Comment s’articule la langue des signes et peut-on l’apprendre facilement ?
« À raison de deux heures par semaine, sur trois ans, les étudiants de l’IUT à qui j’enseigne peuvent avoir de bonnes bases. Ça permet d’apprendre les signes mais aussi de vaincre sa timidité car c’est une langue de gestes. On commence notamment l’apprentissage par des mimes. Le premier geste de la phrase sera le mot fort, un peu comme l’anglais. « Je vais à la maison à Saint-Brieuc » devient : « Saint-Brieuc maison aller » (traduit par le signe de Saint-Brieuc : le point fermé se frottant une joue, qui représente un élément marquant de la ville, ici le savon noir. Puis les bouts des doigts se traduisant pour former un toit. Et enfin la main partant du menton pour aller vers l’avant). Comment on dit Breton ? Le point sur la tête, car on est têtu ! »
* Une interview en gestes de Zohra Nedjimi, par la voix de son ancienne étudiante.
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