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Le français vient du latin parlé… par le peuple

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Je m’en voudrais de faire de la peine à mes bien-aimés lecteurs – a fortiori en cette veille de Noël – mais, enfin, après bien des atermoiements, je me suis résolu à révéler cette cruelle vérité : le français vient du latin, certes, mais d’un latin de la plus vile espèce qui soit.

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Vous ne me croyez pas ? Alors examinons ensemble le mot « cheval ». Logiquement, nous devrions parler d’un « eque », puisque le latin classique utilisait « equus ». Mais notre « cheval » à nous provient de « caballus », un terme qui signifiait à peu près « canasson » ou « vieille rosse » : voyez le registre ! Et ce n’est pas le seul exemple de ce type, loin de là. « Belle » est issu du modeste « bella » (« mignonne ») et non de « pulchra » (« magnifique ») ; « enfant », de « infantem » (« qui ne parle pas ») et non de « puer » ; « tête », de « testa » (« tesson de tuile ») et non de « caput ». Et ainsi de suite.

En un mot comme en cent, le français n’a pas grand-chose à voir avec les plus belles pages écrites par Cicéron, Tite-Live et Virgile. Son véritable ancêtre est à chercher du côté de la langue des marchands, des soldats et des esclaves de l’Empire romain… Entre les deux : autant de points communs qu’entre un texte de Proust et une conversation au bistrot lorsque le PSG passe à côté d’une rencontre en Coupe d’Europe (pléonasme ?).

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Cela, on le sait aujourd’hui, mais lorsque l’on a commencé à se pencher sur l’origine du français, cette idée était totalement inenvisageable, comme le rapporte dans un livre saisissant le linguiste Bernard Cerquiglini (1). Et pour cause : puisque le roi de France était puissant, sa langue devait nécessairement avoir une source prestigieuse. La seule question, au fond, consistait à choisir entre l’hébreu, le grec, le celte (que l’on croyait héritier du grec) et le latin des grands auteurs. Il a fallu du temps, beaucoup de temps, pour renoncer à cette théorie. Mais les écarts de vocabulaire et de syntaxe entre le français et le « bon » latin étaient tels qu’on a dû se rendre l’évidence : la langue du roi, hélas, venait du peuple (2)…

Une dangereuse rivale nommée langue d’oc

Ce fut un premier cataclysme. Il y en a eu deux autres. Bientôt, on découvrit que le français était de surcroît « impur » ! De fait, il a tout d’abord subi l’influence (modeste) du gaulois, pratiqué avant l’arrivée des Romains, mais aussi celle, plus marquée, du francique, apporté par Clovis et les siens. Une germanisation qui a pris chez nous une ampleur considérable, puisqu’elle concerne aussi bien les verbes (« blesser », « marcher », « tomber ») que certaines couleurs (« blanc », « bleu », « brun », « gris »), sans compter les prénoms (Albert, Clothilde, Guillaume, Hugues, Mathilde, Robert, etc.) et même la prononciation, avec la multiplication des mots commençant par un g ou un h aspiré (« garçon », « garder », « guerre », « hache », « hanche », « héron », etc.). C’est bien simple : le français est la langue romane la plus éloignée du latin ! « Cette empreinte est telle que l’on peut parler de créolisation (3) », résume Bernard Cerquiglini.

Et comme si tout cela ne suffisait pas, on s’aperçut encore que le français devait compter sur son propre sol avec une dangereuse rivale, la langue d’oc. Riche d’une littérature prestigieuse, dotée de documents administratifs bien plus anciens et restée de surcroît plus proche du latin, bref, tout à fait digne de régner. Concurrence insupportable pour la langue du roi !

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Pour une nation un brin orgueilleuse comme la nôtre, ces coups successifs ont été difficiles à encaisser. Autant annoncer à des aristos persuadés de descendre de Saint Louis que leurs ancêtres étaient en fait des paysans crottés du Berry… Toutefois, après un petit accès de dépression collective, une réaction s’ensuivit. Le français n’est pas issu du plus prestigieux des descendants du latin ? Qu’à cela ne tienne ! On allait s’employer à l’embellir. Et pour cela, on a su se montrer particulièrement créatif.

En premier lieu, on a « relatinisé » à tout-va, en forgeant de nouveaux mots en partant de la langue de l’Antiquité. Cela était d’autant plus facile que le mouvement était amorcé depuis le XIVᵉ siècle, au moins. A partir d’« eque », pour reprendre cet exemple, on a forgé « équitation » ; à partir de « caput », « capitanat » ; à partir de « puer », « puériculture »…

« Le français est un latin de désespoir »

Même latinisation du côté de l’orthographe. De nombreuses lettres que l’on ne prononçait plus ont été ajoutées ou maintenues à l’écrit, notamment sous l’influence de l’Académie française : « corps », « temps », « teste », « honneste » rappellent « corpus », « tempus », « testa », « honestus » (4). Avec un objectif transparent : redonner du lustre au français en le parant des attributs du vénérable ancêtre. « Enfant bâtard d’une mère insouciante et volage, le français est un latin de désespoir », écrit joliment Bernard Cerquiglini.

Malheureusement, la propagande aussi s’en est mêlée. Le parler de l’Ile-de-France, fût-il de basse extraction, a fini par être présenté comme un idiome supérieur en tout point à ses concurrents. Non seulement, les langues régionales ont subi une redoutable entreprise de dénigrement, mais les langues étrangères n’ont pas été épargnées. Le français dit « thèse », alors que l’italien et l’espagnol optent respectivement pour « tesi » et « tesis », conformément au latin « thesis » ? « Ils se conduisent comme des esclaves ! » soutenait le grammairien Dominique Bouhours au XVIIᵉ siècle. La démonstration était aussi rigoureuse que les travaux de Didier Raoult contre le Covid, mais cela a marché.

Alimenté par ce qui s’apparente à un complexe d’infériorité, un véritable culte autour du français s’est ainsi érigé au fil des siècles. Avec son Vatican (l’Académie française), son livre sacré (le dictionnaire), ses saints très glorieux (Racine, Hugo, Voltaire), ses fidèles desservants (les hussards noirs de la République) et ses tables de la Loi, selon lesquelles le français serait, de toutes les langues, la plus « pure », la plus « claire » et autres balivernes. Un discours qui atteindra des sommets sous la IIIᵉ République et dont nous ne nous sommes pas tout à fait affranchis.

CETTE INFOLETTRE S’INTERROMPT PENDANT LES FÊTES. RENDEZ-VOUS À LA RENTRÉE !

(1) Une langue orpheline, par Bernard Cerquiglini (Editions de Minuit).

(2) Gloire à Pierre-Nicolas Bonamy, qui a mis un terme définitif au débat en 1750. En Italie, confrontée à la même réalité, cette vérité avait été admise un siècle plus tôt.

(3) Créolisation : processus qui à partir de plusieurs cultures en crée une nouvelle.

(4) Préface du premier dictionnaire de l’Académie française, 1694. On remarquera que, depuis, certaines de ces lettres ont été abandonnées, mais pas toutes.

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Cultivons la langue française !, par Michel Feltin-Palas (Editions Héliopoles).

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